Pour réduire les effets du tabagisme, les lieux publics camerounais développent le concept de sans fumée. Concept qui séduit les populations qui fréquentent davantage ces lieux.
Il est midi, c’est l’heure de la pause à Yaoundé. A Socropole, un bistrot situé au quartier Ngousso, le service s’annonce chargé et les serveurs s’activent pour satisfaire tous les clients qui souhaitent profiter de la pause pour se requinquer. Fait particulier, l’établissement est non fumeur. Une signalétique portant interdiction de fumer le fait d’ailleurs savoir à tous les clients.
L’établissement à fait choix original au moment où la lutte anti tabac bat son plein. « Nous avons décidé d’interdire les cigarettes pour le confort de nos clients », explique sous anonymat un gérant de l’établissement. Comme lui, de nombreux lieux publics (des restaurants, des bistrots et bars des établissements scolaires, des véhicules de transport en commun…) de la ville aux sept collines tentent ce pari pour raisons économiques ou personnelles.
En région, le problème du tabagisme inquiète également les promoteurs d’espaces récréatifs et de loisirs. Dans la ville de Dschang par exemple, l’on remarque la création d’hôtels (Mbouho Star Palace, Météo Palace) sans fumée et de night club sans fumée. Selon la Coalition Camerounaise Contre le Tabac (C3T), « Il faut encourager ces initiatives spontanées. Car Il existe aujourd’hui une clientèle insatisfaite, qui désire pouvoir manger et boire sans être importunée par la fumée de cigarette», souligne Dr Flore NDEMBIYEMBE, présidente de la C3T.
Pour l’heure, il est difficile de dire si l’interdiction de fumer dans les lieux publics influence, le chiffre d’affaire de ces derniers. Situé à Obili, un Snack-bar disposant d’espaces fumeurs et non-fumeurs depuis plus de 6 mois, n’a pas enregistré de variation de son chiffre d’affaires. «Il arrive qu’un client reparte, très mécontent, mais la majorité apprécient beaucoup le concept. Certains viennent même spécialement pour cela », observe Yvette ATOGO, la gérante. « Les serveurs sont, eux aussi, très satisfaits » conclue-t-elle.
Du côté de la clientèle, les avis divergent. Pour Saïd et Blandine, tous deux non fumeurs, la mesure est la bienvenue. Les jeunes gens, âgés d’une vingtaine d’années, ne seraient d’ailleurs pas hostiles à l’idée que la pratique gagne d’autres lieux publics camerounais. Une opinion que ne partagent Marthe, sexagénaire rencontré à la Météo palace «Je suis pour l’interdiction de fumer à l’intérieur», explique-t-elle. «Cela dit, bien que non-fumeuse, je pense qu’il faut laisser un espace aux fumeurs.» Pour d’autres, les espaces non-fumeurs leur donne l’opportunité de profiter des espaces récréatifs. C’est le cas de Raïssa T, étudiante à l’université de Dschang, « avant il m’était difficile d’aller en BT (Nigth Club) parce que les bouffées de fumée de tabac m’étouffait, mais avec la création des Club sans tabac, je peux faire le fête sans problèmes », confie-t-elle.
Au Cameroun, le tabagisme passif est un problème de santé publique qui concerne l’ensemble de la société, fumeurs comme non fumeurs, enfants et adultes. Selon les résultats de l’enquête mondiale sur le tabagisme chez les adultes menée en 2013 par l'Institut national des statistiques en collaboration avec le ministère de la Santé Publique, près de 6720 000 personnes sont exposées à la fumée secondaire du tabac dans les lieux publics. Cette exposition représente un risque majeur aussi bien pour les fumeurs que pour les non fumeurs. En effet, le tabagisme, quelque soit sa forme est responsable de cancers, de maladies cardio-vasculaires et de maladies respiratoires…
La multiplication des lieux publics sans tabac est le signe que les populations camerounaises souhaitent voir aboutir des mesures pouvant les protéger des dangers du tabagisme.